Rôle & Pouvoir du sport pour bâtir des sociétés plus inclusives des jeunes porteurs de handicap
Du 28 juillet au 6 août se dérouleront les IXe Jeux de la Francophonie, à Kinshasa (République démocratique du Congo). Parmi les disciplines sportives, on retrouve l’athlétisme handisport qui regroupe 7 épreuves ouvertes aux jeunes para-athlètes de l’espace francophone. Pour certaines et certains, il s’agira d’une répétition générale avant les XVIIe Jeux paralympiques d’été de Paris 2024. Mais d’une manière générale, comment le sport peut favoriser l’inclusion sociale des jeunes porteurs de handicap ?
Le sport comme outil d’inclusion sociale
Depuis l’adoption d’une résolution par l’Assemblée générale des Nations unies en ce sens en 2013, le 6 avril est déclaré Journée internationale du sport au service du développement et de la paix. Cette résolution reconnaît l’influence positive du sport sur les progrès liés aux droits de l’homme et au développement économique et social. En décembre 2018, une nouvelle résolution souligne le rôle du sport comme facteur de développement durable et sa contribution à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD).
Par sa capacité à rassembler les gens de divers horizons autour d’une même activité, à toucher l’ensemble des populations et en particulier les plus jeunes grâce au principe du jeu, et à provoquer des bienfaits autant physiques que psycho-émotionnels, le sport joue un rôle essentiel dans l'inclusion sociale, notamment pour les jeunes en situation de handicap.
Plusieurs études ont montré que la participation régulière à des activités sportives peut améliorer l'estime de soi et la confiance en soi chez les jeunes en situation de handicap. En développant leurs compétences sportives, ils acquièrent également une meilleure perception de leurs capacités et une plus grande confiance dans leurs interactions sociales. En s'engageant dans des équipes sportives inclusives, les jeunes en situation de handicap peuvent se sentir acceptés, valorisés et intégrés au sein de la société.
Ryadh SALLEM, champion de natation, de basket et de rugby fauteuil, déclarait lors d’un colloque organisé sur cette thématique : « Le sport c’est un projet qui fédère, vous animez votre établissement : il y a les sportifs qui vont en compétition et les camarades qui avaient un handicap plus lourd venaient nous encourager, c’est un vrai projet collectif »[1].
Le pouvoir du sport de haut-niveau pour briser les barrières physiques et mentales
Grâce à leurs performances remarquables, les para-athlètes démontrent, à eux-mêmes et au monde, que le handicap n’est pas une fatalité. Les journalistes sportifs vous le diront : les rencontres avec des para-athlètes sont celles qui marquent le plus, tellement ceux-ci décuplent les valeurs de respect, de dépassement de soi et d’excellence qui sont intrinsèques au sport, en particulier de haut-niveau.
« Le sport m’a permis d’avoir une identité positive et de lutter contre les stigmates, il me permet de m’épanouir et mon intégration sociale, le sport me donne une autonomie, une bonne santé, une bonne qualité de vie, le savoir-vivre, le savoir-être, le savoir-faire. Sur le plan psychologique, le sport me permet d’avoir une prise de conscience de nos possibilités et de nos limites. C’est une réconciliation avec notre propre « moi » »[2], indique - Abdel Rahman Ouorou Barè, président du Comité national paralympique du Bénin. Membre de l’équipe du Bénin de basket-ball en fauteuil roulant.
En repoussant les limites, en poursuivant des records, les para-athlètes sont source d’inspiration pour tous les jeunes porteurs de handicap en leur permettant de changer leur perception du handicap et de leur ouvrir le champ des possibles, ainsi que pour la société en général.
A propos d’une journée de sensibilisation organisée dans une école, le nageur David Smetanine a évoqué : « En se mettant dans un fauteuil roulant, les élèves se rendent compte de la difficulté que nous avons, de la rapidité et de la dextérité qu’il faut avoir, et cela permet en fin de compte de constater que nous sommes des athlètes de haut niveau. Ce terme n’était pas inconnu pour les élèves présents, mais il y a eu néanmoins une prise de conscience forte, car nous avons les mêmes tenues que les athlètes valides, les mêmes primes aussi. Surtout, nous montrons qu’il n’y a pas de différence et que le handicap peut être pleinement intégré »[3].
Les défis pour des sociétés plus inclusives des jeunes porteurs de handicap
Les performances incroyables des para-athlètes ne font pas tout, elles doivent atteindre le grand public pour permettre de sensibiliser l’ensemble de la population sur les obstacles qu’affrontent au quotidien les jeunes porteurs de handicap, et sur les solutions à mettre en place pour les éliminer.
La médiatisation du handisport est ici essentielle : « les sportifs Handisports n’ont pas de salaire donc la reconnaissance, c’est une part importante de rétribution, pour faire comprendre aussi à nos proches pourquoi on passe autant de temps à s’entrainer, se déplacer en compétions » indique Ryadh Sallem, champion de natation, de basket et de rugby fauteuil.
« La visibilité des sportifs en situation de handicap et notamment la médiatisation des compétitions constituent un levier au bénéfice de l’égalité des droits et de la lutte contre les discriminations » estime Lydie Cohen, membre du comité scientifique du think tank Sport et citoyenneté[4]. En interviewant les para-athlètes, en retraçant leur parcours et en leur donnant tout simplement la parole, un espace d’expression s’ouvre pour sensibiliser le plus grand nombre sur le quotidien des personnes en situation de handicap et les façons de l’améliorer.
D’autres mesures peuvent favoriser la participation des jeunes porteurs de handicap dans le sport, comme rendre les infrastructures plus accessibles, sensibiliser les structures locales, former le personnel encadrant, etc.
La pratique sportive dite de « loisir » ou de haut-niveau et la visibilité des para-athlètes de haut-niveau participent donc chacun à leur niveau à l’inclusion sociale des jeunes porteurs de handicap. « Grâce au cécifoot, j’ai une vie sociale, j’ai des amis, j’entretiens ma santé » avait témoigné Aboubakar, jeune guinéen résidant à Lyon[5].
Le handisport aux Jeux de la Francophonie
Aux IXes Jeux de la Francophonie de Kinshasa, qui se tiennent du 28 juillet au 6 août, le Handisport (athlétisme) est l’une des 8 disciplines sportives et se déroulera concomitamment aux épreuves d’athlétisme, au Stade des Martyrs entre le 31 juillet et le 4 août (retrouvez ici le programme des compétitions sportives et culturelles). Le handisport est apparu pour la première fois à la programmation officielle des Jeux de la Francophonie lors de la 7e édition des Jeux (Nice, 2013).
Le handisport comporte 7 épreuves : 200 mètres (H), saut en longueur (H), lancer de javelot 800g (H), 100 mètres (F), saut en longueur (F), lancer du poids 3kg (F), lancer du disque 750g (F). Les épreuves sont organisées par le CIJF en collaboration avec World Para Athletics, dans le respect de sa réglementation.
En marge des compétitions sportives, le Pavillon de la Francophonie accueille tout au long des Jeux des animations et discussions passionnantes. Le 2 août, entre 10h30 et 12h (heure de Kinshasa, soit 11h30 à 13h heure de Paris), l’Unité jeunesse, sport et citoyenneté a invité plusieurs experts à la table ronde intitulée « Changer les perceptions : Réflexions sur la participation sportive des femmes et des jeunes en situation de handicap ». L'enregistrement de cette table ronde est disponible sur Youtube :
Pour creuser le sujet :
L’inclusion des personnes handicapées grâce au sport, émission « 8 milliards de voisins », RFI, 19 mai 2021.
Sport et handicap, émission « Le téléphone sonne », France inter, 4 avril 2023.
Paris 2024 : Dimitri Jozwicki, la fusée qui veut casser les barrières du handicap invisible, France info, par Clément Mariotti Pons, 30 mars 2023.
Le sport favorise-t-il l’inclusion des personnes en situation de handicap ?, Actes du colloque organisé par l’Association des Elèves Directeurs d’établissement sanitaire, social et médico-social, 6 novembre 2018.
[1] https://www.gepso.fr/static/uploads/2019/02/Actes-du-colloque-sport-et-handicap-final.pdf
[2] https://www.rfi.fr/fr/podcasts/7-milliards-de-voisins/20210519-l-inclusion-des-personnes-handicap%C3%A9es-gr%C3%A2ce-au-sport
[3] https://sportetsociete.org/2018/01/12/interview-david-smetanine-montrer-que-le-handicap-peut-etre-un-atout-une-force-et-non-une-contrainte/
[4] https://www.sportetcitoyennete.com/articles/que-seraient-des-jeux-olympiques-et-paralympiques-reussis-pour-les-personnes-en-situation-de-handicap
[5] https://www.rfi.fr/fr/podcasts/7-milliards-de-voisins/20210519-l-inclusion-des-personnes-handicap%C3%A9es-gr%C3%A2ce-au-sport